Quand les noms de rue font Merveilles

Publié le 10 juin 2020

Pourquoi la ville de Cergy abrite-t-elle une rue du Désert aux nuages ? Une rue de la Lune de corail ? Une allée des Météores de paille ou une place du Nautilus ? La réponse à tout cela porte un nom : la toponymie. Explications...

La toponymie est la science qui étudie les toponymes, autrement dit les noms désignant un lieu. Dans une ville traditionnelle – mettons Paris – elle s’efforce de retrouver l’origine linguistique, historique et sociologique des noms de lieux, de quartiers ou de rues. Mais dans une ville nouvelle comme Cergy, les choses sont un peu différentes. Lorsque les urbanistes de l’établissement public d’aménagement (EPA) de Cergy-Pontoise commencent à dresser les plans des voies de la ville nouvelle, la question ne se pose pas. Sur les documents de l’époque, le boulevard de l’Hautil s’appelle alors V18 et la rue de la Préfecture porte le joli nom de CP1 (Cergy Préfecture 1). Un seul de ces noms a survécu. Il s’agit de l’Axe majeur, qui était le nom de code donné à ce projet courant sur plus de trois kilomètres. Aucune proposition de nom n’ayant été jugée satisfaisante, l’Axe majeur est finalement resté… l’Axe majeur.

« Faites-moi des propositions et on verra… »

Lorsque les premiers habitants sont sur le point d’arriver, il semble un peu difficile de leur demander de se domicilier dans des rues au nom de science-fiction. Les urbanistes de l’EPA vont alors voir le maire de Cergy de l’époque et lui demandent – c’est le conseil municipal qui décide du nom des rues – ce qu’ils doivent faire. Réponse : faites-moi des propositions et on verra… Un peu désarçonnés, les urbanistes se mettent néanmoins au travail, avec deux idées bien précises. Tout d’abord, ne pas tomber dans la banalité. À l’époque, la mode, pour les villes ou les quartiers nouveaux, est aux noms de rues en série. Toutes les rues d’un quartier vont ainsi porter des noms d’écrivains, tandis que d’autres s’orneront de noms de fleurs ou de cinéastes. Pas très original, ni très imaginatif. Deuxième idée : inscrire les noms de rues dans l’histoire du lieu. Après tout, des gens vivaient et travaillaient sur le territoire de Cergy bien avant l’arrivée de la ville nouvelle. Cette plongée dans les racines du territoire est à l’origine de certains noms, comme la rue Saint-Martin (du nom de la célèbre foire de Pontoise), le quai des Mariniers ou le chemin du bac de Gency. Côté fantaisie, les urbanistes inventent des noms imagés – et imaginaires – comme le passage des Ballerines, la place aux Dames ou la cour des Enchanteurs.

La parole aux enfants…

La ville nouvelle continue de se développer et avec elle apparaissent d’autres rues, voies et places à baptiser. C’est le cas notamment du quartier du Grand Centre et des hauts-de-Cergy. Dans les années 90, Isabelle Massin, la nouvelle maire de Cergy, décide d’aborder la question de façon différente. Elle fait appel aux habitants, et plus particulièrement aux jeunes, chargés de faire des propositions à un jury qui sélectionne les noms. Des élèves de première du lycée Jules Verne imaginent ainsi les futurs noms pour le quartier Gare. De là naissent la rue de l’Embarquement, la place des Allées et Venues, le rond-point de l’Aube, la rue du Lendemain… Une classe de 5e du collège du Moulin à Vent se charge du quartier du lycée. Avec à la clé des noms qui évoquent… Jules Verne, comme la rue du capitaine Némo, la place du Nautilus, la rue Passe-Partout ou le boulevard des Explorateurs. Mais le plus original reste le travail réalisé, entre la gare et la place du Nautilus, par une classe de 4e Segpa (section d’enseignement général et professionnel adapté) de ce même collège. Sous la houlette de leur professeur de français – qui leur apprend la technique de l’association des mots – les élèves imaginent une série de noms poétiques, qui donnent aujourd’hui son identité à ce quartier : rue du Désert aux nuages, allée des Météores de pailles, rue de la Lune corail, rue des Brumes lactées…

Au fait, pourquoi le passage Monsçavoir ? Parce que l’école de Cergy Village, que dessert le passage, a longtemps eu à sa tête un couple d’instituteurs, Mr et Mme Monsçavoir, qui ont marqué la vie de l’établissement. Monsçavoir, un nom rêvé pour des enseignants…

En savoir plus

En cherchant bien, vous trouverez, dans certaines bibliothèques et médiathèques de Cergy-Pontoise un « Dictionnaire des noms de rues et de lieux de Cergy », réalisé pour le 30e anniversaire de l’agglomération. Une véritable mine pour tous ceux qui veulent découvrir l’origine des noms de lieux qui les entourent.