L’idée du FabLab – pour Fabrication Laboratory – est née sur le campus du prestigieux MIT, le Massachussetts Institute of Technology aux États-Unis (78 Prix Nobel au compteur…). Le concept ? Proposer un lieu ouvert à tous, sans condition d’âge ni d’études, où chacun – profane comme initié – peut donner libre cours à sa créativité et à son imagination, grâce à la mise à disposition d’outils, notamment numériques, au partage d’expérience avec d’autres membres et à l’appui du réseau mondial des FabLabs.
Libérer sa créativité
« Quand on vient dans un FabLab, on ne sait pas forcément ce qu’on va faire, ni comment on va le faire, mais on a envie de le faire ! », explique Laurent Ricard, chef d’entreprise, enseignant à l’université de Cergy-Pontoise (UCP) et cofondateur du FacLab (Fac pour Faculté), le FabLab de l’UCP, situé dans son antenne de Gennevilliers. « Nous accueillons tous les publics, des jeunes aux retraités, et les étudiants sont loin d’être les plus nombreux. Pas besoin d’être féru de technologie. On peut commencer par des choses simples, puis découvrir de nouvelles façons de faire, de nouveaux outils. Un exemple : qui ne connaît pas la technique du pochoir, cette feuille de carton découpée pour créer une forme, qu’on colorie ensuite avec une brosse ? Eh bien, au FacLab, on peut utiliser un logiciel de dessin pour réaliser des formes qu’on découpe ensuite avec une découpeuse laser ou vinyle… Un bon moyen pour libérer sa créativité et explorer d’autres possibilités. Nous explorons l’apprendre ensemble, sans enjeu ni jugement, pour oser faire ».
Mais attention : le FabLab n’est pas un atelier de bricolage en libre-service, même s’il est gratuit ou, pour les structures associatives, financé par une modeste cotisation. C’est avant tout une communauté, fondée sur une approche de collaboration et de partage. Les principes en ont été définis par la « Charte des FabLabs », élaborée par le MIT (voir notre encadré) Chaque membre d’un FabLab s’engage à documenter ses projets, autrement dit à les mettre à disposition de l’ensemble des membres et du réseau. Cette approche collaborative peut prendre aussi d’autres formes : organiser un atelier lorsqu’on possède une compétence ou un savoir-faire particuliers ou, tout simplement, donner un coup de main pour ranger, entretenir et améliorer le local.
Le FabLab n’est pas un atelier de bricolage en libre-service. C’est avant tout une communauté fondée sur la collaboration et le partage
Smocks et potager
Un état d’esprit qui a séduit Sylvia Lam, utilisatrice du FacLab : « Après 25 ans dans le prêt-à-porter, je m’ennuyais un peu. J’ai lu le livre de Chris Anderson : « Makers : la nouvelle révolution industrielle », qui m’a fait découvrir les FabLabs. J’ai poussé la porte de celui de l’UCP. Cloé, l’une des deux FabManagers qui veillent sur le lieu, m’a expliqué les ressources et le fonctionnement du FacLab et présenté les autres membres. Depuis, je viens deux fois par semaine. Je connaissais déjà les imprimantes 3D, mais j’ai découvert la découpe laser. Aujourd’hui, je m’intéresse à l’e-textile, c’est-à-dire le mélange entre la couture et les microprocesseurs. Avec d’autres, je travaille à la création d’un manteau « augmenté » pour les cyclistes. Et j’ai également réalisé des bijoux fantaisie, avec des LEDs intégrées, qui changent de couleur. De mon côté, j’anime des ateliers sur les smocks, un point de couture peu connu en France, donnant un rendu spectaculaire par son effet d’origami ».
Les FabLabs aident aussi à faire émerger des projets, qui déboucheront – peut-être – sur la création d’une entreprise. C’est le cas de Julien Morin, un ingénieur informaticien qui est arrivé au FacLab en mars dernier, avec son idée de potager d’intérieur automatisé et connecté, qui peut fournir une famille en plantes aromatiques et petits légumes : « J’avais évidemment des connaissances en informatique, mais je manquais de compétences sur la création d’un prototype, le travail du bois, la découpe laser… En plus, j’habite un appartement, ce qui n’est pas très pratique pour travailler à un prototype. Ma femme remercie tous les jours le FacLab !… L’environnement collaboratif a beaucoup joué dans le développement du projet. Il m’a permis de le confronter à d’autres membres, de bénéficier de leur savoir-faire dans certains domaines et, ainsi, de faire évoluer le concept ». Preuve qu’un FabLab est aussi un accélérateur de connaissances : Julien anime un atelier de découverte électronique – ce qui n’était pas son domaine de départ – ainsi qu’un atelier de jardinage. Aujourd’hui, il se prépare à faire appel à un financement participatif pour finaliser son potager d’intérieur, qui devrait être commercialisé en 2015.
Le FabLab de l’association VoRobotics à Vauréal attire des profils très divers, du jeune passionné au retraité désireux de partager son expérience.
Un FabLab à Vauréal
À Vauréal, le FabLab – installé dans ses nouveaux locaux mis à disposition par la commune – a été créé par l’association VoRobotics. Les quatre fondateurs sont plutôt issus du domaine technique, mais le lieu a vite attiré des membres aux profils très divers, du jeune passionné au retraité désireux de partager son expérience, en passant par des jeunes filles intéressées par le moulage et l’inclusion en résine. Il suffit d’avoir un esprit curieux. Pour le président de l’association, Joël Soranzo – lui-même ingénieur en électronique dans une grande entreprise – les motivations pour devenir membre d’un FabLab sont à la fois nombreuses et variées : « Dans mon cas, il y avait l’envie de « toucher le matériel », alors que j’occupe aujourd’hui des fonctions plus éloignées du terrain. Mais il y a aussi le désir de transmettre et de partager, ou encore l’émulation permise par l’échange et le travail collaboratif. Nous avons par exemple un membre qui possède un local très bien équipé en matériel. Il vient au FabLab pour trouver cet esprit collaboratif. Mais nous avons aussi deux jeunes entrepreneurs qui ont un projet d’entreprise dans la domotique. Nous organisons également du « flash learning », pour former, durant une ou deux heures, une personne qui a besoin d’avancer sur une technique ou un matériel particulier. Car le principe du FabLab, c’est d’avancer et d’apprendre en toute liberté ».
Trois questions à...
Gilles Le Cam, vice-président de la communauté d’agglomération, chargé de l’innovation, de la recherche et du numérique
Quel rôle les FabLabs peuvent-ils jouer sur le territoire ?
L’un des principaux atouts des FabLabs est de permettre un échange et un partage d’outils numériques et de savoirs entre différents acteurs : étudiants, professeurs, entrepreneurs, mais aussi habitants. Le FabLab n’est pas un simple lieu de mise à disposition d’outils ; c’est une véritable communauté ouverte à tous, dans laquelle chacun s’engage à contribuer à son tour. L’ambition des FabLabs est d’aider à faire émerger des idées, à les tester, à les concrétiser, à vérifier la pertinence et la faisabilité d’un projet…
Bien que situé à Gennevilliers, le « FacLab » – le FabLab de l’Université – contribue-t-il au rayonnement de Cergy-Pontoise ?
Cergy-Pontoise est la première agglomération à disposer d’une structure de ce type, ce qui est en phase avec le dynamisme de l’agglomération en matière d’innovation et de recherche. Seule l’antenne de l’université à Gennevilliers offrait alors les espaces nécessaires. L’important aujourd’hui, c’est de faire connaître cette ressource. Beaucoup d’étudiants ou de petites entreprises ne savent pas encore que le FacLab existe…
Un FabLab est-il en projet dans le Grand Centre ?
L’agglomération réfléchit effectivement à un projet de FabLab qui serait situé dans le Grand Centre. Nous y travaillons avec l’université, l’Essec, l’EBI et d’autres écoles. L’enjeu, c’est de trouver un endroit où le FabLab sera visible de tous, pour inciter étudiants, entrepreneurs et simples curieux à pousser la porte, afin de découvrir toutes les ressources offertes par ce type de lieu.