L’édifiante histoire de l’assassinat du banquier Donon-Cadot

Publié le 22 février 2019

Le 15 janvier 1844 un terrible assassinat a lieu à Pontoise. André Donon-Cadot, riche banquier, est retrouvé mort à son domicile, affreusement défiguré. Qui a pu commettre un crime aussi odieux ?

Article paru dans le numéro de janvier de Pontoise MAG, le magazine municipal de la ville de Pontoise

André Donon-Cadot est un notable bien connu de Pontoise. Il vit rue Basse de la Petite-Tannerie (actuelle rue Pierre-Butin), dans une demeure cossue. Riche mais avare, Donon-Cadot vit seul avec son fils cadet, Edouard, tandis que son fils aîné, Charles, habite non loin de là. En ce froid matin d’hiver du 15 janvier 1844, à 9h15, une blanchisseuse sonne à la porte de Monsieur Donon-Cadot. Elle est accueillie par Edouard, le fils cadet, qui lui explique que son père est sorti. Or, nous sommes lundi, c’est le jour où le banquier reçoit sa clientèle et jamais André Donon-Cadot père ne se serait absenté, sachant qu’il a tant d’argent chez lui.

Diverses personnes se « cassent aussi le nez » à la porte du banquier où le fils donne toujours la même explication : son père est parti pour Paris. Le barbier, venu raser André Donon-Cadot, est des plus surpris : jamais Monsieur ne sort sans être rasé de près ! C’est à 16h seulement qu’Edouard Donon décide d’aller chercher son frère aîné Charles, car il s’inquiète de la disparition de son père. Charles appelle un serrurier pour forcer la porte du cabinet de travail de son père fermé à clef.

La scène que les deux frères découvrent est effrayante : André Donon-Cadot gît, inanimé, sur le sol, sa tête baignant dans son propre sang. Le crâne a été complètement défoncé, des giclures de sang ont été projetées jusque sur les murs ! Les tiroirs du secrétaire ont été fouillés, tout l’argent a disparu, 600 000 francs en bons de commerce et 6 000 francs en liquide. Des couverts en argent sont également manquants.

Les bons de commerce réapparaissent peu de temps après, utilisés par un jeune homme nommé Charles. Il vit à Sannois chez son père, le serrurier Pierre Rousselet, qui connaît André Donon-Cadot. A leur domicile, 468 bons de commerce sont retrouvés ainsi que les couverts en argent, enterrés dans le jardin. Le père s’est quant à lui retranché dans une cabane au fond du jardin, armé d’un pistolet. Père et fils sont arrêtés. Le père avoue le crime mais il désigne Edouard Donon, le fils cadet du banquier, comme complice et commanditaire du crime. Celui-ci est incarcéré. La peine encourue par les deux hommes est la peine de mort.

Arrestation de Rousselet, L’illustration du 29 juin 1844, archives municipales.

Le procès débute à Paris le 26 juin. La salle est bondée, les journaux ne se lassant pas de retranscrire tous les détails de cette sordide affaire. Le mobile semble être l’argent et… une femme ! En effet, Edouard Donon souffrait de l’avarice de son père, mais également de la concurrence de celui-ci. Ils avaient la même maîtresse, Caroline Mérandon, une soubrette anciennement au service de la famille. Edouard aurait donc proposé 100 000 francs au serrurier de Sannois, criblé de dettes, pour accomplir le meurtre. Pierre Rousselet aurait frappé le banquier d’une barre de fer et aurait jeté l’arme du crime dans l’Oise.

Salle du procès, L’illustration du 29 juin 1844, archives municipales.

Le 3 juillet, le verdict tombe : Edouard Donon est acquitté, Pierre Rousselet est lui, condamné aux travaux forcés à perpétuité. Pourquoi une telle disparité ? Le fils Donon a pu s’offrir pour sa défense les services d’un ténor du Barreau, maître Chaix d’Est Ange, alors que le serrurier n’a eu accès qu’à un avocat commis d’office. Rousselet mourut au bagne. Quant à Edouard, revenu le soir-même de sa libération à Pontoise, il finit par se ranger et obtint un emploi de clerc de notaire en ville. Son innocence ne fut cependant jamais totalement acquise aux yeux des Pontoisiens.

Le saviez-vous ?

> Parmi les nombreux spectateurs du procès, Honoré de Balzac fut un assidu.

> Deux téléfilms retracent l’histoire de Donon-Cadot, le premier datant de 1956 et le second de 1975.