Le château qui ne voulait pas mourir

Publié le 1 septembre 2013

Au terme d’une histoire mouvementée de plusieurs siècles, il aurait pu disparaître après l’incendie qui l’a ravagé en 2002. Le château renaît aujourd’hui de ses cendres, transformé en maison de retraite.

L’histoire de la seigneurie de Neuville se perd dans la nuit des temps, puisque ses premières traces remontent à 1099, l’année où les Croisés prennent Jérusalem. Au fil des siècles, la seigneurie de Neuville change plusieurs fois de mains. Elle comprend d’abord un domaine avec une simple métairie, puis un manoir assorti de droits seigneuriaux pour son propriétaire. Plusieurs familles nobles, mais aussi des bourgeois de Pontoise, se trouvent ainsi successivement à la tête du domaine.

Amours au bord de l’Oise
Dans sa forme actuelle, avec ses deux ailes et son corps central, le château de Neuville remonte aux alentours de 1640. Au XVIIIe siècle est construit le Pavillon d’amour, charmante bâtisse qui veille depuis lors sur les bords de l’Oise, au pied du pont de Neuville. Après les vicissitudes de la Révolution, le vicomte Cornudet des Chomettes acquiert le domaine en 1822. Avec son épouse, il dépense sans compter pour restaurer le parc et le château, alors dans un triste état. Son fils Joseph sera le premier maire de Neuville, lorsque le village – jusqu’alors un simple hameau d’Éragny – devient une commune à part entière en 1869. Le château reste dans la famille jusqu’en 1959, lorsque la dernière héritière le lègue à l’évêché de Versailles, qui le revend au comte d’Harambure.

Sauvé in extremis
C’est alors qu’entre en scène l’Établissement public d’aménagement (EPA) de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise, l’ancêtre de l’agglomération. En 1989, l’EPA propose d’acquérir une grande parcelle au sud du domaine, pour y construire la future station de traitement des eaux de l’agglomération. Mais le comte exige qu’on lui rachète la totalité de son bien. L’EPA se retrouve donc propriétaire du parc et du château, dont il ne sait que faire. Inoccupé, malgré divers projets, le château se dégrade très vite. Il est victime, le 27 avril 2002, d’un incendie qui ravage toute sa toiture. Le début de la fin ? Non, car la volonté de la municipalité de Neuville de préserver ce patrimoine et d’ouvrir le château sur la ville rencontre celle du groupe Epinomis, qui envisage un projet d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Celui-ci remporte l’adhésion de tous. Envoûté par la magie du château, Jean Liogier, qui dirige alors Epinomis, envisage non seulement la création d’un bâtiment neuf le long de l’Oise mais surtout de restaurer le château pour y installer une extension de l’Ehpad. Pari réussi, comme tous les amoureux des belles pierres peuvent le découvrir.

Grande & petites histoires

Antoine Liogier, directeur du groupe Epinomis

Dès que nous avons racheté le domaine, j’ai eu le souci de la rénovation du château pour en faire une extension de la maison de retraite ouverte en 2006. Mon père avait une vraie vision du projet, conforme à notre philosophie : ne pas faire des établissements coupés du monde. L’ouverture de la cour pavée sur le village, comme une extension de la place de la Mairie, accessibles à tous, répond à cette volonté. La qualité architecturale du château et du site dans son ensemble, au bord de l’Oise et au cœur d’un parc de 8 hectares, l’a finalement emporté sur nos appréhensions. La restauration a été une vraie aventure de près de dix ans, avec des difficultés techniques, des dépenses imprévues, des contraintes réglementaires… Mais mon équipe et moi-même avons toujours été portés par la passion du patrimoine dont nous étions désormais garants comme par le désir de créer un établissement exceptionnel tant pour ses résidents que pour ceux qui se doivent de les accompagner chaque jour. Après la défaillance d’un prestataire, le groupe a même été jusqu’à créer une entreprise de restauration, spécialisée notamment dans le travail de la pierre.