Lorsque la Ferme rose voit le jour au XVe siècle, la Guerre de Cent Ans ravage encore le Vexin, qui ne retrouvera la paix qu’en 1449 avec la reprise définitive de la forteresse de Gisors. Ces temps troublés expliquent que les trois corps de bâtiments de la ferme forment un triangle protégeant la cour centrale. La présence de meurtrières témoigne du souci de se mettre à l’abri des soudards comme des bandits de grand chemin. Ces fermes fortifiées sont d’ailleurs caractéristiques du Vexin.
La ville nouvelle change la donne
Idéalement située au pied du massif de l’Hautil, un peu à l’écart du village de Boisemont – qui a su conserver son caractère rural –, la Ferme rose a d’abord appartenu aux religieuses du couvent de Poissy. Le 23 juillet 1582, celles-ci la vendent à Olivier de la Saussaye, seigneur de Boisemont. Douze ans plus tard, sa veuve revend « terres et seigneurie », qui comprennent notamment la ferme, les étables et le colombier.
Depuis lors, la ferme semble avoir vécu une vie paisible, jusqu’à… l’arrivée de la ville nouvelle. Dans un premier temps, l’exploitation n’est pas concernée par les rachats et l’activité agricole se poursuit jusqu’en 1983. Les terres sont alors expropriées pour laisser place à de nouvelles emprises, l’exploitant obtenant toutefois de conserver la ferme. Mais, faute de revenus, celle-ci menace bientôt ruine.
Tout se joue sur un coup de foudre
La chance survient alors en la personne de Claire et Yvon Chapon. Apres avoir restauré une maison de village à Ecquevilly, dans les Yvelines, le couple souhaite déménager et recherche une autre maison à retaper. La Ferme rose ne correspond pas du tout à ce que Claire et Yvon ont en tête, mais l’agent immobilier leur propose « une petite visite, juste pour voir ». Et ce qui devait arriver arrive : le coup de foudre ! Commencent alors des années de travaux menés de main de maître. Le premier gîte rural ouvre en 1990, puis le second quatre ans plus tard, permettant ainsi – avec le précieux concours du label Gîtes de France – de financer la suite du chantier. Puis viennent les chambres d’hôtes en 2006 et l’activité de table d’hôtes en 2012. Un travail de titan, mais qui trouve sa récompense dans la satisfaction des clients. La preuve : sur le site de notation Booking.com – 423 000 hôtels recensés dans le monde –, une quarantaine de visiteurs ont donné à la Ferme rose la note moyenne de 9,3 sur 10, ce qui la classe dans la catégorie des établissements « fabuleux »…
Grande & petites histoires
Claire Chapon Propriétaire de la Ferme rose
« Je suis d’origine anglaise – le pays des « Bed and Breakfast » – et je viens d’une famille d’hôteliers. Avec mon mari, nous avons tout de suite vu le parti à tirer de ce lieu magique. Mais la restauration – que nous avons entièrement menée de nos mains et voulue totalement respectueuse du bâtiment d’origine – a été une vraie aventure. La maison principale n’étant pas habitable compte tenu de son état de dégradation avancée, nous avons vécu durant cinq ans, avec nos enfants, dans un petit logement attenant, au confort très rudimentaire. Aujourd’hui, grâce à Internet, nous accueillons des clients du monde entier. Nous avons ainsi reçu des clients chinois et australiens… Dans ce cas, le fait de maîtriser l’anglais est un atout. Mais nous accueillons aussi des randonneurs et des touristes français, qui recherchent un week-end au calme, ou encore des personnes en déplacement professionnel ou en formation sur l’agglomération, attirés par les prix attractifs, l’ambiance familiale et un cadre qui change de celui des hôtels. La Ferme rose a bouleversé nos vies à plus d’un titre. Mon mari, qui était informaticien auparavant a tellement appris au cours de ces années de restauration, qu’il a fini par créer – il y a une quinzaine d’années – son entreprise de bâtiment, qui travaille principalement sur les agrandissements et sur… la restauration ! ».