Les fermes du Vexin sont un héritage de l’histoire. Caractérisées par leur aspect imposant, leurs portes cochères monumentales, capables de se défendre au temps des invasions – mais aussi de se protéger des bandes de brigands –, elles ont façonné le paysage du Vexin français. L’habitat dispersé étant très rare dans le Vexin, c’est en périphérie, voire au cœur des bourgs que sont implantées les fermes, autour desquelles les villages se sont développés. La ferme Cavan est l’une de ces « fermes de bourg ».
Ateliers d’artistes
Pendant plusieurs siècles, la ferme Cavan vit sa vie. En 1952, une famille d’agriculteurs des Pays de la Loire reprend l’exploitation. La ferme compte alors 108 hectares, emploie 14 personnes et produit betteraves, pommes de terre et céréales. Mais, à la fin des années soixante, les emprises de la ville nouvelle empiètent sur l’exploitation. L’activité périclite, les bâtiments se dégradent. En 2006, la commune de Courdimanche finit par reprendre la ferme. Mais que faire de ces bâtiments ? Il y a bien un projet d’implantation d’une école, mais il n’aboutit pas. En attendant, les services techniques de la commune y stockent leur matériel. C’est avec le succès des « 24h de l’Art », en 2010, que la ville décide d’initier une démarche mêlant préservation du patrimoine et politique culturelle ambitieuse en mettant en place des ateliers d’artistes dans les locaux de la ferme.
Comme un poisson dans l’eau
Aussitôt dit et – presque – aussitôt fait. La région donne un coup de pouce financier et les travaux de réhabilitation débutent en 2012. En 2013, les premiers artistes investissent les lieux. L’admission se fait sur dossier, dans le souci de diversifier les pratiques, mais aussi de favoriser l’activité, avec des auto-entrepreneurs en artisanat d’art. La Ferme Cavan accueille des artistes comme Corine Pagny, qui expose dans le monde entier, Franck Rouilly (voir ci-dessous), Bruno Rivet, mais aussi l’association Premier Dragon… Si le lieu est propice à la création, pas question toutefois de s’isoler dans son atelier ! La convention prévoit des échanges réguliers avec les habitants. Carnaval, Fête des voisins, Fête de la musique… autant d’occasions d’échanger et d’expliquer son travail. La ferme Cavan n’est encore qu’au début d’une belle aventure, car la commune ne manque pas de projets pour les prochaines années : espaces de convivialité pour les habitants, développement de l’activité artisanale, logement intergénérationnels…
Grande & petites histoires
Franck Rouilly, artiste résident à la ferme Cavan
« J’ai fait des études d’ethnologie, avant de devenir professeur dans un collège du Val d’Argenteuil, auprès d’élèves en difficulté scolaire et sociale. Mais je suis aussi passionné de sculpture et de mosaïque. J’ai entendu parler de la ferme Cavan lors d’une exposition à Saint-Ouen l’Aumône en 2010. Le projet de Courdimanche m’a tout de suite séduit. J’ai postulé en juin 2013 et, après avoir été sélectionné, je me suis installé en septembre, pour une durée d’un an dont j’espère bien qu’elle sera renouvelée. Je ne vis pas sur place mais je viens travailler dans mon atelier dès que j’ai du temps libre. Nous sommes aujourd’hui sept entités artistiques, individuelles ou en groupe. L’ancienne maison de maître a été réhabilitée en ateliers mais, dès les beaux jours, j’aime bien travailler dans les dépendances de la ferme, qui offrent beaucoup d’espace. Au-delà de cette possibilité de travailler dans de bonnes conditions, le principal intérêt d’une résidence d’artiste est de favoriser les échanges. Nous avons beaucoup de discussions et on apprend à se connaître. Les échanges avec les habitants se développent également au fil des mois. Nous avons, par exemple, reçu des enfants de Courdimanche pendant le carnaval. Franchement, créer en résidence d’artiste, ce n’est que du bonheur !… »