Cycle Questions de société au Théâtre de l’Usine

Publié le 29 octobre 2020

Dernière minute : le Théâtre de l’Usine étant contraint de fermer ses portes à partir du 30 octobre, la séance prévue le 6 novembre est reportée. Souhaitant une nouvelle programmation le plus tôt possible, 13 Comme Une publie l’interview prévue des auteurs.

Olivier HUEBER et Geoffroy GUERRIER dans le hall du Théâtre de l'Usine. ©LD-CACP

Olivier Hueber et Geoffroy Guerrier ouvrent leur cycle de lectures jouées vendredi 6 novembre au Théâtre de l’Usine avec Le Discours de la servitude volontaire de La Boétie. Si le premier signe la mise en scène et l’adaptation et le second monte sur les planches, les deux sont avant tout complices de longue date et compagnons de route du Théâtre de l’Usine.

Comment sont nées les lectures-spectacles proposées cette saison au Théâtre de l’Usine ?

Olivier Hueber : D’abord c’est une histoire d’affinités électives. Cela fait 25 ans que nous nous connaissons Geoffroy et moi, car nous travaillons ici avec Hubert Jappelle (Le fondateur de la compagnie du même nom et du Théâtre de l’Usine) depuis longtemps. D’ailleurs chacun d’entre nous est ici tour à tour comédien et metteur en scène.

Geoffroy Guerrier : Il y a 7 ans, Olivier me dit « Je voudrais monter des textes philosophiques avec toi, il n’y aura pas de budget mais on pourra prendre le temps qu’on veut ». L’idée était de Partir de textes universels, qui parlent des choses essentielles. Nous avons monté L’Utilité de l’inutile de Nuccio Ordine, Le Discours de la servitude volontaire de La Boétie, La situation de la classe laborieuse en Angleterre d’Engels et enfin Promenade avec Jean-Jacques Rousseau. Pour l’essentiel les lectures ont déjà été jouées à partir de 2014, au Théâtre de Nesle à Paris et ici-même.

Des lectures-jouées, en quoi consiste cette approche théâtrale ?

GG : Côté forme, c’est très variable en fait. Le discours de La Boétie, c’est de la lecture pure. Pour « Rousseau » je dis mon texte de mémoire, Rousseau parle au public et se parle à lui-même « j’aime l’oisiveté du radoteur qui bat la campagne » écrit-il. Enfin pour l’adaptation d’Engels, c’est mixte : je suis en costume, parfois lisant mon livre, parfois parlant au public donc avec mon texte appris par cœur. Mais toutes ces adaptations ont en commun d’être des « lectures habitées », car ce qui nous intéresse le plus au théâtre est la langue. La langue, c’est ce qu’il y a en premier et c’est bien sûr grâce à elle que l’on peut faire société.

OH : Ce que les Grecs appelaient le logos, à la fois le discours et la Raison, ce qui nous constitue anthropologiquement ! Ajoutons que ces pièces sont suivies de débats avec un invité, philosophe professeur…qui vient en témoin et qui ensuite échange avec le public. L’un de ces invités, enseignant, nous a dit un jour : « Ce que vous faites c’est la même chose que nous les profs, mais vous rendez la langue vivante ».

Geoffroy Guerrier sur scène pour deux des lectures-jouées du cycle « Questions de société ». © Dominique Chauvin

 

Le premier des trois spectacles est donné le 6 novembre, les suivants en janvier et avril. Pouvez-vous en dire un mot ?

OH et GG : Le vendredi 6 novembre le cycle s’ouvre avec la lecture jouée du texte de la Boétie (1530-1563). Ce « discours » annonce les théoriciens du droit naturel, notamment Jean-Jacques Rousseau, en posant d’une part que nul n’a par nature le droit de commander et d’autre part qu’il ne peut y avoir de pouvoir sans contrat.

Pour le second spectacle tiré des écrits d’Engels (1820-1895), Geoffroy est en costume, incarne le philosophe lui-même qui lit son texte et vibre en le lisant. Il harangue un public imaginaire. Engels était lui un grand bourgeois et il dénonce la condition de travail des enfants, la triche des patrons sur les horaires de travail, la pollution dont sont victimes les ouvriers… A la 4e représentation au Théâtre de Nesle on a refusé du monde !

L’adaptation des œuvres de Rousseau sera une première. La pièce est en préparation depuis un an et demi. Olivier a lu toute l’œuvre du philosophe et Geoffroy joue un Rousseau qui se promène, qui parle d’abord de son adoration de la nature puis de sa détestation de la corruption des hommes.

Votre cycle de pièces s’appelle Questions de société. Du théâtre à message ?

OH et GG : Notre sujet est bien sûr celui de la question sociale. Nous avons par exemple retenu de Rousseau sa dénonciation de la cupidité des hommes à s’approprier les richesses naturelles. Il fustige le fort qui pèse sur le faible, le riche qui écrase le pauvre : bref, la force qui n’est pas le droit. Dans l’Emile, ce dernier écrit « Nous approchons de l’état de crise et du siècle des révolutions ». Prophétique !

Et ce n’est pas un hasard si ce cycle se joue au Théâtre de l’Usine. Hubert Jappelle a été notre maître au théâtre, pour Geoffroy depuis 1995. Nous avons même joué ensemble dans le Tartuffe de Molière qu’il a mis en scène. Nous sommes bien sûr totalement en accord avec lui, qui a su sans gros moyens créer un lieu de théâtre rare en France. C’est notre maison ici !

Pratique

Le Discours de la servitude volontaire d’Etienne de la Boétie

Séance du vendredi 6 novembre 2020 annulée en raison des mesures de confinement

 

Théâtre de l’Usine

33 chemin d’Andrésy

Eragny sur Oise

 

http://www.theatredelusine.net/accueil